L’IFPA est une association internationale qui gère un classement des meilleurs joueurs de flippers, à partir de tournois se déroulant partout dans le monde.
Une révolution silencieuse est en marche depuis quelques années : les moins de 30 ans dominent les meilleures places du classement ! C’est un fait nouveau que nous allons décortiquer.
Sommaire
- 1 Le top 10 des joueurs de flipper : dominé par les moins de 30 ans !
- 2 Les limites de l’exercice
- 3 Le rajeunissement des joueurs de compétition : une tendance récente
- 4 Talent et réflexes
- 5 Une transmission entre générations
- 6 Les enfant des années 90, la génération sacrifiée
- 7 Les années 2020 : un contexte favorable au renouvellement
- 8 L’inertie du classement IFPA
- 9 Une tendance qu’on souhaite voir en France
Le top 10 des joueurs de flipper : dominé par les moins de 30 ans !
Posons le décor direct, avec les tranches d’âges des 10 meilleurs joueurs en novembre 2025.

Difficile de nier la domination des moins de 30 ans ! Si on élargit au Top 20, le constat est le même.

Pour finir, voici la ventilation sur le top 100, où l’hégémonie de la jeunesse est moins marquée. Mais on se parle tout de même de 35% de moins de 30 ans. On en conclut que non seulement ils sont nombreux, mais qu’en plus ils sont en proportion de meilleurs joueurs. Respect.

Les limites de l’exercice
Je fais une aparté : les âges sont pour la plupart récupérés sur les fiches IFPA des joueurs. Une minorité de joueurs (moins de 20%) n’a pas renseigné l’info, auquel cas j’ai tenté de la récupérer via d’autres sources :
- Pinside
- Articles de presse
- Estimation au doigt mouillé en regardant les vidéos et photos desdits joueurs
Donc, je peux m’être fourvoyé à la hausse ou à la baisse sur l’âge d’un quidam. Si les chiffres ne sont donc pas 100% exacts, les ordres de grandeur sont respectés. Le but de cet article n’est pas de devenir une référence statistique, mais de partager un constat et d’en identifier les raisons.
Le rajeunissement des joueurs de compétition : une tendance récente
Ce phénomène est récent, en voici la preuve : j’ai relevé l’âge des dix meilleurs compétiteurs ayant participé (ou gagné) aux World Pinball Championships ces dix dernières années. Les WPC sont réservés aux deux meilleurs joueurs de chaque pays qui acceptent de faire le déplacement.
- En 2015 : 37 ans en moyenne
- En 2016 : 42 ans
- En 2017 : 36 ans
- En 2018 : 33 ans
- En 2019 : 33 ans
- En 2020 et 2021 : pas de tournoi pour cause de confinement (vous vous souvenez ?)
- En 2022 : 37 ans
- En 2023 : 28 ans
- En 2024 : 24 ans
- En 2025 : 24 ans
Impressionnant, non ? L’âge moyen a perdu dix ans en une décennie ! Il est temps d’en creuser les raisons.

Talent et réflexes
Le talent de la nouvelle génération ne fait aucun doute, ce qui va être écrit plus bas n’enlève rien à son mérite. Toutefois le talent se retrouve partout et à toutes les époques, donc il ne suffit pas pour expliquer cette domination impressionnante.
Le flipper de haut niveau nécessite deux atouts qu’on retrouve chez les plus jeunes :
- Des réflexes surhumains
- De l’énergie
Sans en avoir la certitude (votre avis en commentaire est le bienvenu), il me semble que le niveau des compétitions augmente, et avec lui, l’importance des qualités physiques. En l’occurrence, le flipper nécessite de réagir en un dixième de seconde pour dévier ou rattraper une trajectoire. Je pense ne choquer personne en affirmant que les réflexes sont plus affûtés à vingt ans qu’à soixante.
Par ailleurs, les tournois très compétitifs se déroulent sur plusieurs jours bien intenses, où l’endurance peut faire la différence. Avoir de l’énergie à revendre est un atout indiscutable.

Mais il serait faux de considérer que la réactivité et l’endurance suffisent. La connaissance des règles de chaque machine et la gestion du stress devraient donner des avantages aux seniors. D’autres paramètres entrent en ligne de compte, c’est certain.
Une transmission entre générations
Les meilleurs joueurs mondiaux doivent voyager, la majeure partie du temps à leurs frais. Tous les tournois ne se valent pas pour grimper dans le classement, voici les villes où ont eu lieu les événements les plus rémunérateurs en points IFPA en 2025 (pour en savoir plus sur le classement IFPA, lisez cet article) :
- Riverside, Californie, USA : IFPA World Championship + It Never Drains in Southern California
- Schaumburg, Illinois, USA : PAPA World Championship
- Bridgeville, Pennsylvanie, USA : Pinburgh Match-Play Championship
- Vöcklaburh, Autriche : EPC25
- Croydon, Angleterre : UK Open Main Tournament (gagné par notre frenchie de 17 ans Alexandre Bouet !)
- Lynnwood, Washington, USA : NW Pinball Championships
- Sherwood Park, Canada : 2025 YEGPIN Match Play Championship
Même pour un Américain qui a la chance d’avoir sur son sol la plupart des compétitions, la note est salée (c’est grand, les US). Autant dire qu’un compétiteur de moins de 25 ans a besoin d’aide pour payer ses déplacements.

Et nous en venons donc à un point majeur de cette démonstration : si la nouvelle génération a pu se hisser si haut et si vite, c’est qu’il s’agit souvent d’une affaire de famille. On peut même dire sans caricaturer que la passion se transmet de père en fils quand on voit la part très (trop) faible de femmes dans notre hobbie.
Les enfants apprennent avec leurs parents, s’entraînent sur les flippers de leurs parents, sont accompagnés par eux sur les compétitions tant qu’ils sont mineurs… De la même façon que Venus et Serena Williams ne seraient pas devenues de grandes championnes de tennis sans leur entraineur de père, il n’y aurait probablement pas eu de :
- Jason Zahler (N°1 mondial) sans Steve Zahler (108ème et ex-propriétaire d’une salle d’arcade),
- Zach McCarthy (N°2) sans Kevin et Laura McCarthy (propriétaires d’une salle d’arcade),
- Alexandre Bouet (N°2 français) sans Axel Bouet (17ème français)…
Je le répète à dessein : cette filiation n’enlève rien au mérite de cette nouvelle génération talentueuse et motivée. Elle est montée sur les épaules de celle d’avant pour atteindre des sommets inégalés.
Il reste un point à éclaircir, sans lequel nous n’aurions pas cette évolution récente.
Les enfant des années 90, la génération sacrifiée
Le flipper existe depuis suffisamment longtemps pour que cette passion puisse se transmettre sur plusieurs générations. Alors pourquoi les jeunes des années 2010 (aujourd’hui trentenaires) n’ont pas obtenu les mêmes résultats que ceux d’aujourd’hui ?
Parce qu’ils forment la génération sacrifiée !
Pour comprendre, il faut revenir à l’histoire du flipper : la quasi totalité des salles d’arcade et des jeux de café a disparu à la fin des années 1990, et avec eux les fabricants de flippers, laminés notamment par la généralisation des consoles de jeux vidéos. Il faudra attendre plus de dix ans pour retrouver un essor de ce marché, cette fois-ci tiré par l’achat des particuliers, et dans des proportions minimes par rapport à l’âge d’or de 1970 à 1999.
Les plus de 40 ans ont découvert ce loisir durant leur enfance et leur adolescence sans forcer, dans n’importe quel bar PMU de village, dans n’importe quelle salle de jeux en ville. Mais en 2005, un adolescent n’avait plus d’occasion de croiser un flipper. Comment former de bons joueurs dans ces conditions ?
Revenons au graphique du top 100 montré plus haut.

Encore aujourd’hui, les trentenaires sont sous-représentés, alors qu’objectivement ils devraient truster les meilleures places :
- Ils ont l’argent pour se déplacer
- Ils sont encore frais, et pour une partie n’ont pas encore d’enfants à charge qui les retiennent de voyager
- Ils pourraient avoir 20 ans d’entraînement si l’histoire du pinball n’en avait pas voulu autrement
Ainsi, la baisse de l’âge moyen des meilleurs compétiteurs s’avère récente car ceux qui les ont précédés n’ont pas eu autant de lieux pour découvrir le flipper avec leurs parents.
Les années 2020 : un contexte favorable au renouvellement
Je poursuis cet article avec quelques raisons complémentaires qui ont sans doute permis à ces jeunes talents de se tourner vers le flipper.
Le confinement de 2020-2021
Tous les professionnels du pinball vous le diront : les périodes de confinement ont représenté des périodes fastes pour la vente de machines. Obligés de rester à la maison, nous avons tous cherché à améliorer nos foyers, et certains en faisant l’acquisition d’une machine. Les enfants, bloqués eux aussi à domicile, ont eu tout loisir de devenir des maîtres de la bille d’argent.
La modernisation des contenus autour du flipper
Cette époque a permis aussi le renouvellement des médias autour du flipper. Avant 2020, notre loisir était couvert par quelques sites web à l’esthétique datée, et des pages Facebook pas beaucoup plus modernes.
A partir du COVID, la scène flipper a investi dans du matériel de streaming. Les émissions sur Facebook, Youtube et surtout Twitch se sont multipliées. Il faudra poser la question aux moins de trente ans pour en être sûr, mais il semble pertinent de penser que cette adaptation du contenu a contribué à leur intérêt pour le flipper.
Un bémol toutefois : le matériel de stream est cher (sans parler de la nécessaire possession d’au moins une machine et d’un lieu suffisamment grand pour héberger les émissions), et donc les animateurs de lives ont tous plus de 35 ans… Pas top pour s’identifier quand on a quinze ans.
L’inertie du classement IFPA
Dernier élément de contexte : pourquoi le rajeunissement de l’âge moyen a-t-il attendu 2023 pour s’enclencher ? Pourquoi le rajeunissement n’a-t-il pas directement démarré en sortie de confinement ?
Tout simplement parce que le classement IFPA se calcule sur trois années glissantes (ou au moins 15 tournois). Après deux ans sans compétition, il a donc fallu attendre que ces prodiges cumulent suffisamment de points pour obtenir les places qu’ils méritent.
Une tendance qu’on souhaite voir en France
Si les moins de trente ans trustent le haut du tableau dans un contexte international, nous en sommes encore loin en France. Le top 20 français en novembre 2025 compte deux joueurs de moins de trente ans : Alexandre Bouet (17 ans) et Adam Bona (25 ans).
Nous sommes une majorité à considérer que l’arrivée d’une nouvelle génération est bénéfique pour la pérennité de notre loisir. Alors espérons que nous vivrons bientôt ce que les Etats-Unis et les pays du nord de l’Europe observent déjà !

