En 2003, Stern pinball commercialise une licence juteuse. Son flipper Lord of the rings accompagne la sortie du dernier volet de la trilogie éponyme, réalisée par Peter Jackson. Dans les jeux vidéos, une sortie adossée à un film enfante souvent d’une grosse bouse bien puante. Dans le monde du pinball, ce genre d’association est la norme, les concepts originaux relevant plutôt de l’exception.
Stern réalise un beau triplé auprès de la communauté des nerds : l’univers du pape de l’heroic fantasy JRR Tolkien, un lancement synchronisé avec le troisième épisode, une machine généreuse en missions. Une partie de LOTR dure aussi longtemps que la trilogie dont le pinball s’inspire… Un peu exagéré, mais à peine ! Nous sommes sur un flipper qui se joue concentré, et à l’endurance.
Stern a produit son flipper à plus de 5 000 exemplaires. En 2009, 500 machines en version Limited Edition ont fait grossir le parc. Pour finir cette intro, nous parlons ici du N°10 sur pinside, donc respect.
Sommaire
Flipper LOTR : le seigneur des quêtes
Lord of the rings se distingue par une avalanche de missions. Je ne me risquerai pas à toutes les décrire. Le pinhead en a pour son argent, la rejouabilité fera la joie des passionnés.
Le joueur choisit entre 3 skillshots en début de partie, dont deux s’obtiennent en dosant correctement le lance-bille. Un mini-plateau représentant « le chemin des morts » en haut à gauche permet de collecter des âmes. Ce jeu dans le jeu incite au « nudge », c’est-à-dire à bousculer gentiment le flip’ pour que le parcours maximise le nombre d’âmes reçues. Des leds vertes à la verticale du plateau indiquent par où passer.
Une fois cinq mille âmes atteintes, un multiball à 3 billes se lance. Le jeu en comporte quatre en tout : un pour chaque film et un dernier pour Gollum. Pour ceux qui ont dormi pendant les rediffusions à la télé, Gollum, l’affreux hobbit dégénéré, cherche à récupérer son anneau. Il lui a été piqué dans la saga qui précède le seigneur des anneaux par Bilbo. Celui-ci est l’oncle de Frodon, le héros geignard de la trilogie. Une querelle de famille façon « clash des gitans ».
Seul un joueur possédé par Sauron peut activer le Wizard Mode : il nécessite de compléter un nombre démoniaque de missions. Et encore, les pros recommandent de les réaliser dans un certain ordre, car en recommencer une déjà réalisée sans la réussir à nouveau implique parfois de devoir en refaire plusieurs. Pour comprendre l’ampleur de la tâche, je vous recommande cette vidéo diffusée sur PAPApinball. Garantie sans spoiler, la séquence ne dévoile pas le mode wizard en lui-même.
La communauté des toys
Douze figurines agrémentent le plateau. Impressionnant. L’inventaire coche toutes les cases de l’univers de Tolkien tout en compilant des objets variés.
Le balrog, un démon des entrailles de la terre et l’un des plus beaux éléments du flipper, trône au milieu du playfield. Une des quêtes l’active et consiste à le frapper. Cette mécanique évoque celle du monstre de Frankenstein sur Monster Bash. Sur la version Limited Edition de 2009, le tir doit être précis et puissant, à tel point que l’effort demandé vaut beaucoup plus que son impact sur le score. Le Lord of the rings initial n’exige pas la même concentration, une trajectoire légèrement de biais à vitesse modérée semble suffire.
Par ailleurs, on accède à l’anneau « pour les gouverner tous » via une rampe gardée par un spinner (un petit panneau tournant) qui ralentit vicieusement la bille. Aucune permissivité dans la visée, il faut du skill. Au centre de l’anneau Unique, un aimant capte la bille puis la dirige vers une rampe sinueuse représentant Narsil, l’épé d’Aragorn le beau gosse ténébreux.
Les tours de Barad-Dûr et Orthanc gigotent frénétiquement lorsque l’Oeil de Sauron est abattu. Cette séquence rappelle fortement celle de Medieval Madness. Qu’y a-t-il de mal à s’inspirer des meilleurs ?
Un jeu profond, des figurines nombreuses, qui sans être particulièrement travaillées, s’intègrent parfaitement dans l’univers… Que manque-t-il au flipper seigneur des anneaux ?
Pinball LOTR : la malédiction du son et de l’animation
Commençons par le plus petit des défauts : le pinsound. la bande originale des films de Peter Jackson apporte ses morceaux épiques, rien à dire là-dessus. Les acteurs jouant Frodon et Gimli ont contribué à la bande-son. Il s’agit d’une ligne de plus au contenu inédit qui personnellement me laisse de marbre, mais ne crachons pas dessus.
Mais que s’est-il passé sur le reste ? Clairement, les voix et les bruitages sont un cran en dessous du reste, avec une mention spéciale à l’annonce du jackpot dans le multiball des deux tours. Moi qui vient de passer quelques heures sur le sujet, je plains les familles des pinheads qui entendent en boucle « Jackpot Onnnnnnnne » et « Jackpot twooooooooo ». On en viendrait à vouloir saboter la machine.
Un petit bémol me direz-vous. Vous avez raison, mais j’en ai un autre autrement plus costaud. Pour l’animation sur l’écran, Stern a réussi un tour de force : rendre méconnaissables quasiment tous les personnages des films. La faute au dot matrix display me direz-vous.
Tout d’abord, il y a des artistes du DMD, les limitations techniques n’expliquent pas tout. Des décennies de jeu vidéo en pixel art ont démontré que quelques points oranges bien arrangés peuvent plaire à l’œil. Par exemple, rien n’excuse l’elfe du shoot again qui n’a même pas les oreilles pointues.
De plus, sur le LE de 2009 que nous testons, un écran en couleur (non d’origine) et plus de « points » aggravent les choses. Sur une animation initiale propre, la couleur et une meilleure résolution améliorent la compréhension des saynètes. Là, c’est le contraire, il faut le faire !
Les décors animés donnent l’impression d’avoir été dessinés sur un tableau magique (vous savez, l’espèce d’ardoise de notre enfance avec les deux boutons, qu’on secoue pour effacer). Certaines références aux scènes épiques en deviennent obscures. Pauvre Gollum, tu étais moche et inquiétant dans le film, tu es moche tout court sur le flipper.
Comment classer Lord of the Rings ?
LOTR est profond, exigeant, quasiment « infinissable ». Il est tout désigné pour les pinheads qui aiment le challenge, particulièrement bien venu durant les périodes de confinement. Les meilleures parties dépassent l’heure de jeu.
Joueurs « casual » passez votre chemin, les règles vous sembleront obscures, vous ragerez sur ces rampes qui ne se laissent pas dominer.
Enfin, l’équipe Stern a particulièrement respecté la licence dans ses mécaniques et son plateau. Apprécier l’univers de Tolkien rajoute au plaisir d’une partie. Et pourtant, être fan ne s’avère pas indispensable. La marque des grands jeux.
FICHE TECHNIQUE
GÉNÉRAL :
Fabricant : Stern Pinball
Date de production : Novembre 2003 puis décembre 2009
Thème : Fantasy – sous licence
Type : Solid State Electronic
Processeur : Stern Whitestar (modifié)
Abréviation : LOTR
Unités produites : environ 5 100 puis 500
Prix de lancement : N/C
TOYS :
Éléments 3D : Différentes figurines réparties sur le plateau, tour de Orthanc.
Gadgets : Balrog mécanique et lumineux, tours de Barad-dûr qui peut être renversée, mini playfield.
Modes : Quatre modes multiball (un pour chaque film et un pour Gollum).
ÉQUIPE TECHNIQUE ET ARTISTIQUE :
Game Design : Chris Granner, George Gomez, Keith P. Johnson
Mecanique : George Gomez, Ray Tanzer, John Rotharmel, Jim Novy, Wesley Chang
Software : Dwight Sullivan, Keith P. Johnson
Artwork : Jerry Vanderstelt, Kevin O’Connor, Margaret Hudson
Animation : Kurt Andersen, Mark Galvez
Son : Chris Granner
Musique : Chris Granner